Maurice Szmidt est devenu un homme lorsque, convalescent, il s’est mis à rédiger ce qu’il venait de subir afin d’en conserver la mémoire qu’il sait fragile. Aussi est-ce sans détour ni omission qu’il nous livre dans ce témoignage la cruelle réalité de ce qu’il a vécu, du premier coup de canon qui le réveille le 10 mai 1940 à Anvers – où, venu de Pologne, il vivait avec ses deux sœurs et ses parents juifs pratiquants –, aux retrouvailles avec sa famille à Lyon trois ans plus tard.
Parti adolescent de la Belgique attaquée par les armées allemandes pour trouver refuge dans l’Hérault, il connaît la dégradation des conditions de vie des Juifs et les aides du CAR (Comité d’aide aux réfugiés), et de l’ORT (Organisation-Reconstruction-Travail) dont il bénéficie, devenant élève de l’école d’agriculture de La Roche. C’est là qu’il est victime de la grande rafle des Juifs de la zone dite libre d’août 1942.
Interné au camp de Casseneuil, il transite par celui de Drancy avant d’être déporté par le convoi n° 30 à destination Auschwitz qu’il n’atteindra pas : à Cosel, il est sélectionné pour le travail forcé. Il n’a que 17 ans et commence pour lui un parcours de survie de trente-deux mois dans six camps de concentration nazis différents : Johannsdorf, Kochanowitz, Borsigwerk, Blechhammer, puis au terme d’une marche de la mort de 250 km, Gross-Rosen et enfin Buchenwald, libéré par ses détenus peu avant l’arrivée des Américains (11 avril 1945).
La force de la parole de Maurice réside dans la lucidité et l’honnêteté qu’il met dans le récit de ses souvenirs, encore vivaces en lui. La précision et la clarté de son récit permet au lecteur d’appréhender l’ignominie du système nazi élaboré pour avilir, exploiter et exterminer les Juifs, mais aussi de comprendre la diversité des traitements selon les camps et les différences de comportement des détenus eux-mêmes. |